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Déconstruire le concept d’éducation bancaire de Freire. Une page d’un chercheur-acteur.

 

Avez-vous déjà lu Freire, cet auteur brésilien d’une pensée assez riche et profonde? Quand à moi, je l’ai découvert dans le cours de pédagogie en 2e année au CFEF de l’UNDH. Par la suite, un de ses concept : « l’éducation bancaire » a particulièrement retenu mon attention l’année de mon master dans le cours Penser le sujet de Jean Jacques Schaller, sociologue à Paris 13. En tant que chercheur-acteur, je me propose d’analyser ce concept afin de dégager une unité de sens.

 

L’éducation est-elle bancaire ?

Pour critiquer l’oppression des classes dominantes sur les classes défavorisées, Freire fait usage de la notion d’’éducation bancaire’. A mon point de vue, le terme est mal choisi.

Une éducation peut-elle être bancaire ? Si oui, qu’est-ce qui peut paraître bancaire dans une éducation ?

Tout d’abord, il est nécessaire de définir ce qu’on peut appeler ‘’bancaire’’. Bancaire est un adjectif dérivé de banque. Une banque s’occupe des transactions financières en encaissant et en distribuant des sommes d’argent pour faciliter les échanges économiques.

A l’école, réalise-t-on ces mêmes opérations financières ? Je crois que non.

A ce sujet, Philipe Meirieu dans une intervention le jour de clôture de la biennale de 2012 axée sous le thème de la transmission au Conservatoire National des Arts et métiers (CNAM) a repris les termes de Freire dans une approche critique de la transmission. Pour lui, l’éducation bancaire consisterait à transmettre les produits culturels, les savoirs scolaires selon une logique marchande dans laquelle les enseignants ne sont jamais vains puisqu’ils en tirent toujours un intérêt de ce qu’ils transmettent. Comment concevoir l’idée d’une éducation bancaire comme une philosophie, une anthropologie de l’homme ? Dans un premier temps je dirais une éducation aussi normative qu’elle soit n’est pas et ne saurais être bancaire.

 

L’éducation n’est pas bancaire

Dans l’étymologie du terme éducation on trouve deux termes : educare (nourrir) et educere (faire sortir, élever le niveau. Ceci réfère au développement tant intellectuel, moral, technique que physique (Fabre (1994), Reboul (2001). Il faut recontextualiser la pensée de Paolo Freire pour mieux la découvrir et en saisir le sens. En réalité, il (Freire) prenait le contre pied de la théorie du tabula rasa qui faisait de l’enfant un être à façonner par des adultes soi-disant achevés. Ces derniers étant chargés de lui transmettre la culture, le savoir. Kant va montrer que l’inachèvement de l’homme continue toute sa vie. Quant à Freud avec sa théorie de l’inconscient démontrera que subsistent des restes de l’enfant même chez l’adulte.

Avec les nouvelles pédagogies, les pédagogies actives, cette tendance connaît sa plus grande expansion qui, tantôt vont placer l’enfant au centre, tantôt se pencher sur les centres d’intérêt des enfants (Decroly), tantôt miser sur l’activité créatrice libre des élèves en organisant des ateliers dans la classe, à l’image des activités sociales (Freinet). Cette révolution pédagogique n’a pas fait sortir l’éducation d’un état bancaire à un état non bancaire mais a ouvert de nouveaux espaces qui facilitent les conditions d’apprentissage.

 

L’éducation est libératrice

Pour Olivier Reboul (2001), l’école est ce qui unit et ce qui libère d’où l’éducation que Freire voulait promouvoir est une éducation qui n’est pas bancaire mais qui soit libératrice (Freire, 2001) ou émancipatrice (Rancière, 2012) qui s’appuie sur des pratiques qui prennent en compte l’environnement de l’enfant, la vie de l’enfant.

L’éducation qu’il a appelée bancaire est de préférence une éducation qui enferme l’enfant dans une routine, un enseignement trop théorique qui ne favorise pas la réflexion et qui n’accorde pas suffisamment de place à l’expérience de l’enfant se limitant à des devoirs, des clichés, des notes de cours, de la répétition mécanique des notions sans aucun lien avec l’expérience du milieu de vie, avec la réalité concrète.

 

Références bibliographiques

1.       Fabre M. 1994. Penser la formation. Paris, Puf

2.       Freire P. 2001. La pédagogie des opprimés, Paris, la Découverte.

3.       Morandi F. 2005. Pratiques et logiques en pédagogie. Paris, Nathan.

4.       Prost A. et Meirieu Ph. Les formes sociales de la transmission, conférence présentée à la Biennale internationale de l’éducation et de la formation, CNAM, Paris, Juillet 2012

5.       Rancière J.  2012. Le maître ignorant - Cinq leçons sur l’émancipation intellectuelle. Paris, Fayard.

6.       Reboul O.  2001. La philosophie de l’éducation. Paris, Puf

7.       Reboul O. 2008. Les valeurs en éducation. Paris, Puf

8.       Reboul O. 2010. Qu’est-ce qu’apprendre. Paris, Puf

 

 

Déconstruire le concept d’éducation bancaire de Freire. Une page d’un chercheur-acteur.

Johnson CHERY, Doctorant en médiation, Master en formation des adultes et chargé de cours à l’université.

N.B La version primaire de l’article a été rédigé en juillet 2012. Première publication et partage, Juin 2015.